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France : Société

En fait, en langue, tout est négociable

Sur son blog, Fluctuat nec (pas encore) mergitur, le blog d'une prof de lettres au collège, Lucie Martin décrit un stage de formation sur la grammaire, qu'elle a fait récemment. Un véritable désastre. 

[…]Au cours du stage, un collègue a demandé comment analyser une phrase avec plusieurs verbes et plusieurs sujets. Par exemple : « Lucie a passé de bonnes vacances, le Père Noël a été généreux, les fêtes furent très réussies. » Réponse de l’inspecteur : on ne considère que le premier sujet. Le sujet de la phrase, c’est Lucie. Et le Père Noël ? Et les fêtes ? Ce sont bien des sujets eux aussi ! Ils sont sur le même plan que le sujet « Lucie » ! Eh bien non, d’après l’inspecteur. Consternation muette dans les rangs.[…]

Alors nous, que devons-nous enseigner à nos élèves ?

Réponse : Kev Adams.

Non, je ne plaisante pas. Mon taux d’alcoolémie est depuis longtemps redescendu à un niveau tout ce qu’il y a de plus raisonnable. Au stage, on nous a fait travailler sur un extrait d’interview de Kev Adams, idole des jeunes dont les textes peuvent être considérés comme humoristiques, mais sûrement pas littéraires.[…]

Nous étions affligés. Bien sûr que nous faisons travailler nos élèves sur les différents niveaux de langue, pour les habituer à les repérer, à les utiliser, à passer de l’un à l’autre… Mais est-ce vraiment notre rôle de leur donner à lire du Kev Adams ? […]

Là je sens que certains sont atterrés, et ont hâte d’en finir. Eh bien non ! Il me reste à vous raconter un point encore de ce stage, et pas le moindre. Car devant nos yeux ébahis, le problème de la difficulté des accords français a été résolu en une maxime à graver en lettres d’or au-dessus de tous les tableaux de France et de Navarre : « en fait, en langue, tout est négociable ».

Si. Je vous jure. Si l’élève a fait une faute, mais qu’il est capable de justifier son choix, même de façon totalement erronée, alors nous devons considérer qu’il a raison.

Par exemple, s’il écrit « Les cadeaux que Lucie a reçue lui ont plue », nous sommes en droit (ô généreuse inspection) de lui demander des comptes sur ses accords défaillants des participes passés. Mais si l’élève répond « Ben on parle de Lucie, or Lucie est une fille, donc j’ai mis des E », eh bien cet élève, qui a fait preuve d’une capacité à justifier ses erreurs… a finalement raison ![…]

Je préciserai quand même que les inspecteurs eux-mêmes semblaient dépités, et ne nous ont donné l’impression que de répéter un discours formaté avec lequel eux-mêmes n’étaient pas du tout en accord. Mais, en fonctionnaires, ils ont fonctionné.

Car manifestement ces « directives orthographiques » viennent de haut, de très haut. Elles sont mêmes appliquées pour montrer l’exemple sur le compte Twitter officiel du Palais de l’Elysée, pas plus tard que le 31 décembre 2016. Je vous laisse donc avec la lecture des messages retranscrivant le discours de vœux du président de la République française. Votre mission, si vous l’acceptez, est de trouver ce qui, il y a encore peu de temps, constituait des « fautes d’orthographe ». A vous ensuite d’inventer la justification adéquate qui permet dorénavant de passer outre et d’écrire n’importe quoi."[…]

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