Partager cet article

Valeurs chrétiennes : Culture

Ce que nous enseigne la chute de l’Empire romain

Dans son dernier ouvrage, Les derniers jours (Les Belles lettres), Michel de Jaeghere s'oppose à la thèse, en vogue depuis une quarantaine d'années, selon laquelle la chute de l'empire d'Occident n'aurait pas été une catastrophe mais

"une transformation et une mutation fécondes [entre Romains et Barbares], quasi indolores et presque pacifiques, qui auraient heureusement accouché de la civilisation de l'Europe médiévale."

Le directeur du Figaro Histoire et du Figaro Hors Série s'explique dans les colonnes de FigaroVox. Extraits :

"Cette approche a cependant fini par déboucher sur l'occultation des séquences violentes, des guerres, des pillages, qui ont ponctué, malgré tout, ce passage de témoin. Polarisée sur les indiscutables éléments de continuité qu'en dépit de la rupture peut repérer l'historien, la nouvelle vulgate en vient souvent à nier que l'effacement des structures politiques de l'Empire romain d'Occident se soit traduit, comme l'a montré avec brio l'historien et archéologue Bryan Ward Perkins, par un recul saisissant des conditions de la vie matérielle, une disparition des beaux-arts, de la culture littéraire, et, finalement, de la paix, du bien-être. Elle tend, par là, à devenir le support d'un discours idéologique affranchi de l'observation des faits, qui paraît animé par la volonté de proclamer l'équivalence des cultures et les bienfaits qu'apporteraient nécessairement les Barbares en donnant aux prétendus «civilisés» l'occasion d'un fructueux métissage. (…) Pour rendre compte de «l'ampleur de la catastrophe», il fallait en revenir aux faits."

De ces faits, qu'il décrit longuement au FigaroVox, Michel de Jaegere tire deux leçons :

"La première est sans doute qu'il est illusoire de prétendre faire subsister une zone de civilisation entourée d'une périphérie livrée à l'anarchie et à la misère. Parce que la prospérité attirera toujours irrésistiblement vers elle les populations qui en ont connaissance. La civilisation a donc vocation à s'étendre jusqu'à trouver devant elle une civilisation concurrente, avec laquelle tenter de nouer un dialogue, établir les bases d'un concert des nations. Il est significatif que pour Rome, le coup de grâce vint des Barbares, non des Perses qui constituaient depuis des siècles la superpuissance rivale. Son erreur fut de se résigner à l'arrêt des conquêtes dans le Barbaricum, la grande forêt germanique. Les Romains estimèrent que le profit à tirer de la colonisation de l'Europe orientale ne valait pas le coût et l'effort surhumain qu'auraient représenté sa conquête et sa romanisation. Ils furent victimes de ce calcul à courte vue, qui rappelle le cartiérisme contemporain. La chute de l'Empire romain ne fut pas le produit d'un choc de civilisations (les Germains n'avaient guère qu'une culture rudimentaire – on ne peut, à mon sens parler de civilisation pour un monde qui ignore la cité, lieu de l'échange, du tri et de la hiérarchisation – et leurs élites étaient elles-mêmes en voie de romanisation). Elle fut la conséquence et la solution violente d'une différence de niveau de développement. Le problème est qu'elle se traduisit par un effondrement du niveau de vie tant pour les populations autochtones que pour les immigrants, et même pour les Barbares restés en Germanie, qui cessèrent de profiter des échanges dont ils avaient bénéficié de la part du monde romain.

La seconde est que les grands empires multinationaux ne valent rien dans la défense. Ils excellent à s'étendre, tant qu'ils sont portés par le caractère irrésistible que leur puissance semble donner à leur domination, enrichis par les ressources que leur procurent leurs annexions. Mais ils sont incapables de susciter dans leur population le dévouement que l'attachement sentimental à une patrie charnelle peut seul inspirer à des citoyens. Leurs habitants peuvent leur être attachés tant qu'ils procurent la prospérité et la paix, le bien-être. Mais ils n'accepteront que rarement de remettre en question le confort qu'ils leur apportent en sacrifiant leur vie pour leur défense. Ces empires sont donc condamnés à la conquête perpétuelle, ou au dépérissement. Les sentinelles du Désert des Tartares savent qu'il ne leur appartient que de gagner du temps, dans l'attente d'un inéluctable écroulement."

 

Partager cet article

6 commentaires

  1. La chute de l’empire romain était une bénédiction, car cet empire était pourri, décadent, immoral, métissé… L’arrivée de nos ancêtres Germains a revigoré l’Europe et permis 1000 ans d’arts et de gloire.

  2. Bien d’accord avec de Jaeghere: le métissage imposé et le multinationalisme n’amènent que ruine et désarmement des Nations face aux périls.
    La France, envahie par une ruée innombrable depuis 40 ans, abandonnée et livrée sans défense au mondialisme destructeur de ses emplois et de son économie par ses propres gouvernants depuis 30 ans, n’est plus que l’ombre d’elle-même.
    Et sa perte est proche, à moins d’un sursaut patriote profond et vigoureux, porté par une nouvelle Jeanne d’Arc.
    Ce qui, sous les couleurs de Marine, commence à se profiler enfin à l’horizon…

  3. Sur un certain plan, on assiste bien à un effondrement de la civilisation. Mais ce qu’il faut dire aussi (et qui n’est peut-être pas dit) c’est que l’Eglise reprend à son compte le côté civilisateur de l’administration romaine avec ses monastères, avec son organisation qui , telle qu’elle existe encore aujourd’hui, est toujours celle qui prévalait sous Rome sur le plan politique. En fin de compte, les barbares ont fini par être civilisés, non par Rome mais par l’Eglise et les chrétiens à partir du Bas Moyen-Age et ce jusqu’à la période de la Renaissance.
    Le cataclysme que nous allons bientôt connaître avec les migrations actuelles pourra-t-il permettre que le même phénomène se reproduise ?
    On peut en douter. Simplement parce que l’Eglise est dans une période de doute très profond . Les migrants actuels imposent leurs modes culturels parce que les chrétiens n’ont plus la Foi des premiers Temps du Christiannisme.

  4. Il existe beaucoup de theses qui pretendent expliquer la chute de Rome; pour ma part je retiens celle de la faillite financière: on a constaté que la proportion d’or dans les monnaies ne cessait de diminuer et, malgré les pillages continuels de l’or étranger, comme la Dacie, l’empire ne parvenait plus à payer ses mercenaires, ce qui s’est traduit par le fameux “sac” de Rome lorsque les germains sont venus se payer sur place.
    On a pu constater dans l’Histoire que tous les empires se sont effondrés à la suite d’une crise financière; c’est évidemment un sujet d’inquiétude pour notre pays.

  5. J’ai hâte d’avoir l’avis des récentistes sur la fin de Rome…
    Le récentisme est un nouveau mouvement d’historiens qui remettent en cause la version officielle depuis l’Empire Romain jusqu’à nos jours.
    Selon eux une grande partie de l’histoire précédant le 12 siècle serait le fruit de l’invention des scriptes religieux qui étaient en charge de l’écrire.
    Ce mouvement prend une importance grandissante en Russie et dans les pays anglo-saxons, il est très méconnu en France, Pierre Dortiguier étant le premier à aborder le sujet.
    http://metatv.org/le-recentisme-ou-l-histoire-revisitee-avec-pierre-dortiguier-meta-tour-toulouse
    Autre confèrence très intéressante sur la maçonnerie http://www.myvido1.com/QYyg3VkZlVzMlVGxWUutWP_maconnoscopie-plet-par-le-professeur-pie , critique mais qui change des rodomontades habituelles

  6. Jamais entendu parler des récentistes, par contre de multiples déclarations sur le christianisme qui aurait amolli les Romains devenus trop gentils …

Publier une réponse

Nous utilisons des cookies pour vous offrir la meilleure expérience en ligne. En acceptant, vous acceptez l'utilisation de cookies conformément à notre politique de confidentialité des cookies.

Paramètres de confidentialité sauvegardés !
Paramètres de confidentialité

Lorsque vous visitez un site Web, il peut stocker ou récupérer des informations sur votre navigateur, principalement sous la forme de cookies. Contrôlez vos services de cookies personnels ici.


Le Salon Beige a choisi de n'afficher uniquement de la publicité à des sites partenaires !

Refuser tous les services
Accepter tous les services